CHALLENGE 2021
LES POÈMES DE L'AUBE
de MAI à AOÛT
Un poème chaque matin...
SEPTEMBRE
Photo de l'auteure
(1) HAÏKU 112
Sors de ta coquille
Ne reste pas dans le noir
et reprends espoir
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(2) HAÏKU 113
Franchis locéan
en effleurant la surface
tel un cormoran
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(3) MAILLES
Lorsque tout chancelle,
les fils sentremêlent,
se croisent à linfini,
fils de peur et de survie.
Mailles dun filet de sang
qui enserre et qui sétend.
Monde irrationnel
qui se démantèle.
Certains meurent,
dautres senfuient
ou bien sombrent dans loubli.
Les fous ont pris le pouvoir,
et sèment le désespoir.
Ils sont tous imbelles,
cherchant lessentiel.
Regards jaunis par le sable,
regards noirs et immuables.
Ils se tournent vers le ciel
qui les prendrait sous son aile.
Les fils sentremêlent.
Combat perpétuel.
Qui écoutera leurs cris ?
Leurs larmes se sont taries.
Dans la grisaille dun soir
sest évanouie leur histoire.
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(4) À VOL DOISEAU
A vol doiseau,
où se situer
dans cet univers sans couleurs ?
Forêts blanches sur les plateaux,
falaises noires,
rivières en apesanteur...
Où sont partis
le bleu du ciel,
le vert dun sous-bois enchanteur,
les traînées de rose orangé
quand vient le soir,
les arcs-en-ciel brodés de fleurs ?
Tout est grisaille.
Il suffirait
quun peintre dépose en douceur
des touches de soleil éparses,
aléatoires,
mille nuances de couleurs.
Il aurait sans doute suffi...
mais cela ne sest pas produit.
A vol doiseau,
le jour senfuit.
Sans bruit.
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(5) HAÏKU 114
Lhorizon séveille
pose un voile de lumière
Marche douce-amère
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(6) CYCLE DU TEMPS
Le cycle du temps
sinverse un instant,
et tu tinterroges :
quy a-t-il après lexpansion finale ?
Quy a-t-il avant
le bam du Big Bang ?
Tu pressens ainsi
la fin qui sétale
en un éternel recommencement.
Le temps se déforme
et tout accélère,
cercles concentriques,
bulle aléatoire ou monde à lenvers.
Tu entends déjà,
loin dans lunivers,
le bam du Big Bang,
autre et identique
qui ébranlera lavenir cosmique.
Le cycle du temps
nest pas immuable.
Tu ne peux comprendre
le chant des étoiles, le souffle du sable,
lombre des trous noirs
incommensurable.
Et le temps sécoule
dans un sablier,
un grain après lautre...
en milliards dannées.
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(7) PIERRE ANGULAIRE
Quel est lendroit ?
Quel est lenvers ?
Le lac révèle ses mystères.
Le jour est sombre,
la nuit est claire.
Recherche la pierre angulaire.
Quel est lenvers ?
Quel est lendroit ?
Le lac nest pas ce que tu crois.
La nuit frémit,
le jour sétire.
La pierre est dans tes souvenirs.
Quel est lendroit ?
Quel est lenvers ?
La brise effleure la surface
et les abords
dun lac de glace.
Lombre dun aigle
plane et sefface.
Quel est lenvers?
Quel est lendroit ?
La pierre existe, elle est en toi.
Le jour hésite,
la nuit flamboie.
Ecoute lécho de sa voix.
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(8) HAÏKU 115
Eclats dans la nuit
Ce fut un instant fugace
Puis tout sévanouit
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(9) SPHÈRE
Regarde devant toi.
Est-ce un soleil tombé
un matin de septembre,
étoile qui rougeoie
et qui se réinvente ?
Des braises se répandent,
des pierres et des cendres,
et le reflet doré
dun sourire sans joie.
Une sphère étonnante,
déposée sur le sol
quand le ciel est tourmente
et la poussière vole.
Elle est là sans y être...
Elle se met soudain
à rouler sans raison
plus loin que lhorizon,
finit par disparaître.
Las-tu imaginée,
simplement ébauchée
sur les pierres dun mur ?
Etait-ce lillusion
dun passé qui murmure
ou un rêve insensé
et son dernier frisson ?
Une sphère hors du temps
que tu nas pu saisir
dont il reste pourtant
lombre dun souvenir.
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(10) HAÏKU 116
Quitte les sous-bois
les arbres bleu outremer
Le vent te libère
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(11) HAÏKU 117
Le chant du ressac
taccompagne dans la nuit
Sans monotonie
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(12) UNE PART DE RÊVE
Quelle est la part de rêve
que tu toctroies
lorsque la nuit sachève
et le jour nest encore
quun pan de ciel plus clair,
lébauche dune aurore ?
Quelle est la part de rêve
que tu espères,
imaginant un être
revêtu de lumière
qui sapproche à pas lents,
le regard transparent.
Quelle est la part de rêve
qui sévapore ?
Tu chevauches Pégase
ou la licorne dor...
Et tes songes secrets
deviennent le reflet
de la réalité.
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(13) HAÏKU 118
Simple déchirure
Intérieure ou extérieure ?
dun cur en pâture
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(14) QUATRE MURS DE CIEL SANS LIMITES
Un pan de ciel
derrière
les grilles
dune prison.
Espoir ténu
derrière
les mots dune chanson.
De quel côté
se situe lhomme,
celui qui rêve
de liberté ?
Quatre murs
de ciel sans limites
et le métal
qui sentrecroise
sur les nuages.
Quatre murs
de pierre insolites,
et le parfum
imaginaire
dautres rivages.
Quelle est la voie
quil voudrait suivre
sil le pouvait
et sil avait
vraiment le choix ?
Barreaux transformés
en sculpture
que le temps
cisèle ou dément.
Grillage rouillé
par le vent
des siècles durant...
que la vie épure.
Quel est le secret
quil murmure ?
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(15) FÉE MINNIE THÉ
Fée Minnie Thé, qui es-tu ?
Tu es la femme qui nas plus
besoin de paraître étrangère
quand tu perçois des mots amers.
Fée Minnie Thé, que vois-tu ?
Le gris dun ciel qui ta émue,
le reflet dun monde à lenvers,
lenfant qui ferme ses paupières.
Fée Minnie Thé, que veux-tu ?
Les baguettes sont superflues.
Tu te redresses, tu espères
offrir des bouquets de lumière.
Fée Minnie Thé, où vas-tu ?
Tu suis un sentier méconnu
quand un rayon de lune éclaire
tes fossettes et tes yeux pers.
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(16) HAÏKU 119
Couleurs dun été
qui se posent sur les poutres
à la dérobée
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(16) IVRESSE SYMPHONIQUE
Où étais-tu lové
quand le feu tournoyait ?
Tu nosais pas sortir
de cet abri de jais.
Tu écoutais les bruits
mais ne pouvais comprendre
tout ce quils signifiaient.
Des notes de musique
saccrochaient aux portées,
et toi seul aurais pu
en détacher les clefs.
Tu vibrais, inconscient,
bercé par la fusion
des notes et des mots.
Celle qui te portait
dans son propre horizon
chantait comme le vent...
Sonate ou concerto.
Un monde de musique
où tu nageais sans fin.
Ivresse symphonique
où tu te sentais bien.
Il te faudra sortir
de cet espace clos
et découvrir la vie.
Ce sera pour bientôt.
Bientôt...
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(18) TU AS MARCHÉ JUSQUAU SOIR...
Tu as marché jusquau soir
et le lac est apparu.
Il recélait un mystère
auquel tu ne croyais plus.
Tu as fixé la surface,
plein despoir, mais incrédule.
Tu as cru voir une image,
voilée par le crépuscule.
Qui est celui que tu cherches
entre les gris et les blancs,
celui que tu imagines
et qui est inexistant ?
Les sommets et les vallées
se sont fondus dans la nuit.
Tu nas gardé que lécho
dun visage blanc et gris.
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(19) HAÏKU 120
Kaléidoscope
avant léparpillement
des graines au vent
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(20) LAUTOMNE NEST PAS LOIN
Les nuages seffeuillent
lautomne nest pas loin.
Il attend sur le seuil
à lorée du matin.
Le ciel en trompe-lil
lui insuffle un parfum
que lautomne recueille
en attendant demain.
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(21) HAÏKU 121
Posé sur les feuilles
lété indien salanguit
Septembre senfuit
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(22) HAÏKU 122
Qui monte à pas lents
cet escalier de fortune ?
Lécho dun enfant
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(23) SOUVENIRS PARTAGÉS
La mer entre par la fenêtre
et il la regarde glisser
sur les souvenirs dune enfance
qui commençaient à sestomper.
Les vagues soudain les raniment.
Il se revoit dans un ravin,
respirant les senteurs humides,
caracolant sur un chemin.
La mer entre par la fenêtre
distillant des bruns et des verts.
Il revit son passé lointain
sur un bateau imaginaire.
Quelle est la part de vérité
et les souvenirs quon sublime ?
Peu à peu, la mer se retire...
Il retrouve enfin ses racines.
Ann Rocard
(Texte écrit en lien avec une uvre de mon frère Patrick Rocard, puis tableau-photo à partir de ce même texte)
Photo de l'auteure
(24) PRENDRE LE TEMPS...
Ecoute le temps qui sécoule
chaque jour,
de plus en plus vite.
Tu ne pourras pas retenir
les grains de sable sur orbite.
On te dit quil faut élaguer
certaines branches de ta vie.
Tu te sentirais amputée,
privée dhier et daujourdhui.
Ecoute le temps qui respire
à la lisière dun grand bois.
Tu ne sais pas faire une pause,
tu cours
toujours
comme autrefois.
On te répète : « Fais des choix !
As-tu quelque chose prouver ? »
Tu lignores,
mais tu continues
à poursuivre mille projets.
Ecoute le temps qui séloigne
dans cet immense sablier.
Il te faudra prendre le temps,
suspendre ce temps qui senfuit
avant la tombée de la nuit,
prendre enfin le temps dexister.
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(25) HAÏKU 123
Entre ombre et lumière
jai ressenti sa présence
Etat visionnaire
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(26) DERNIÈRES ROSES TRÉMIÈRES
Cest aujourdhui,
cétait hier...
Et les dernières
roses trémières,
sur quelques tiges solitaires
enlaçaient la fin de lété.
Cest aujourdhui,
cétait hier...
Elles se disaient en colère
davoir attendu si longtemps
avant de fleurir et daimer.
Leurs couleurs déjà pâlissaient.
Leurs surs nétaient plus que des graines
qui renaîtraient lannée prochaine
ou disparaîtraient à jamais.
Cétait hier,
cest aujourdhui...
Lautomne est là,
lété sennuie.
Et les dernières
roses trémières
sen sont allées.
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(27) HAÏKU 124
Quelle est ta blessure ?
Tes mots parfois se fissurent
noyés damertume
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(28) PAYSAGE INVERSÉ
Il ny avait aucun miroir,
mais ce paysage inversé,
venu du fond de ta mémoire,
te fit revivre le passé.
Larbre se dressait de guingois.
Tu caressais ce tronc rugueux,
le lichen glissait sous tes doigts
et saccrochait à tes cheveux.
Cétait au cur de la forêt,
sur un sentier, avec ton père.
Il séloignait, tu le suivais,
malgré la neige de lhiver.
Pourtant, il ne reste aujourdhui
quune image très colorée,
du jaune, du noir et du gris.
Tu as voulu tout oublier.
Nier ce qui est advenu,
remplacer les cris par des rires,
enfouir ce qui nexiste plus
à labri dautres souvenirs.
Il ny a pas un seul miroir,
mais ce paysage inversé,
venu du fond de ta mémoire,
te fait revivre le passé
que tu as si longtemps nié.
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(29) HAÏKU 125
La mer est amère
Dun passage qui sentrouvre
jaillit la lumière
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(30) HAÏKU 126
Une pluie détoiles
séparpille sur la toile
dune Aranéide
Ann Rocard
OCTOBRE
Tableau de l'auteure
(1) ABSENCE
Tu te faufiles
entre les troncs
à la recherche de labsence.
Que signifie
ce mot qui danse
dans les sous-bois ?
Mot égaré,
mot endeuillé par la souffrance
qui évoque un départ soudain,
un envol au fil des années.
Tu te faufiles
entre les troncs
et ne perçois quindifférence.
Cependant
par intermittence,
tu aperçois
certains visages
dans le bleu et le gris des arbres.
Tu tétonnes de leur présence...
Le temps se suspend,
en apnée.
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(2) HAÏKU 127
A peine visible
une voile à lhorizon
Est-ce une illusion ?
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(3) HAÏKU 128
Dernière étincelle
qui enflamme un soir doctobre
le cri des sarcelles
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(4) FUITE
chanson
Pourquoi veux-tu toujours
descendre vers labîme ?
Quelle est lombre incertaine
qui tattire sans cesse ?
Lorsque que le clapotis
de leau nest plus que rimes,
tu entends au lointain
les mots dune caresse.
Qui prononçait ces mots
dans une autre région ?
Une mère, une sur
dont la voix mélodie
te berçait de mirages,
et de tant dillusions.
Tu as cru aux miracles...
Un soir, tu es parti.
Tu as dû traverser
locéan qui délivre.
Tes amis ont péri
et toi seul as rejoint
une côte inconnue
où tu pensais revivre.
Mais il ny a personne
pour te tendre la main.
Tu fixes la surface
de leau dans ce vieux port.
Tu regrettes déjà
dêtre le survivant
dun voyage épouvante
quand les autres sont morts.
Tu nas plus que ces mots
enchanteurs, en chantant.
Tu es venu dailleurs
Ton passé sévapore.
Que signifie la peur
pour toi qui las vécue ?
Tu nas plus à présent
que le gris de ce port
et des bribes de voix
que tu nentendras plus.
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(5) HAÏKU 129
Les vagues de feu
veinent la carte du Tendre
de neige et de cendres
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(6) PASSAGES
Jaime les passages
qui mènent vers linconnu
de jours gris ou bleus
quon croyait avoir perdus.
Passages étroits
au pied dun vieux mur de pierres,
entre les rochers
ou dans un tronc centenaire.
Souvent jimagine
my faufiler en silence,
découvrir un monde
de lumière et renaissance.
Est-ce une autre vie,
celle qui nest pas la mienne
ou bien lutopie
dun au-delà qui mentraîne ?
Jaime ces passages,
à lécoute de surprises.
Jattends, en suspens...
Léternité simprovise.
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(7) HAÏKU 130
Suis-je être ou paraître ?
Ne me faites pas confiance
Mieux vaut me connaître
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(8) ARIA
Une aria qui senvole
sans limite de temps
ni lisière despace.
Une aria et je sens
lunivers qui menlace.
Jeffleure linfini,
portée par la musique,
et je reste en apnée
quand le violon sépuise
et que la voix dun ange
me grise,
enfin comprise.
Une aria qui senvole
sans limite de temps
ni lisière despace.
Je nai plus de repères,
envoûtée par le rythme,
et je ferme les yeux
sans chercher de présence.
La voix me met en transe,
je danse
et je mélance.
Une aria qui senvole
sans limite de temps
ni lisière despace.
Une aria et je sens
lunivers qui menlace.
Ann Rocard
Photo de l'auteure (provisoire)
(9) Haïku 131
Un éclat de ciel
où rechercher labsolu
Songe immatériel
Ann Rocard
Le Festival de musique de la baie du Mont-Saint-Michel est un temps de pause propice à la poésie et la contemplation.
Photo de l'auteure
(10) HAÏKU 132
Jai ouvert les yeux
et le Mont mest apparu
entre nuit et bleu
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(11) CONTEMPLATION
Jai cueilli un brin de soleil,
linquiétude sest estompée.
Au loin sélevait la Merveille,
je me suis sentie apaisée.
Une seconde ou bien une heure,
sans la moindre interrogation,
oubliant les cris et les pleurs.
Une simple contemplation.
Le Mont bercé de prés salés
et la brume dans mes cheveux.
Le Mont voilé
au fond des yeux.
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(12) VIVRE LINTEMPORALITÉ
Savoir cerner le superflu,
élaguer enfin linutile,
les peurs et les pensées futiles,
vivre un instant ce qui nest plus,
tel un tremplin vers linvisible.
Savoir chercher la vérité
entre les mots superficiels.
Pouvoir discerner léternel
quand le souffle sest arrêté,
et simmerger dans lindicible.
Apprendre,
mais aussi désapprendre
lenvie de chercher à savoir.
Juste suspendre
laléatoire.
Vivre lintemporalité.
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(13) HAÏKU 133
Des fleurs sur la vase
tels des oiseaux migrateurs
que lautomne embrase
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(14) HAÏKU 134
Il a traversé
la baie sans se retourner
Mais survivra-t-il ?
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(15) HAÏKU 135
Derrière la grille
la liberté séparpille
Comment la cueillir ?
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(16) PRÊTE-MOI TON CORPS
Jai le diable au corps,
encore et encore.
Si tu es daccord,
prête-moi ton corps,
prête-moi ton cur
toi qui peux marcher,
courir et danser,
toi qui nas pas peur
de toujours tomber.
Quimporte la flamme !
Même corps et âme.
Si tu es daccord,
prête-moi ton corps,
prête-moi tes yeux
toi qui témerveilles,
devant une abeille
posée sur le bleu
dun éclat de ciel.
A cor et à cri.
Un corps sans un cri.
Si tu es daccord,
prête-moi ton corps,
prête-moi tes mots,
toi qui sais chanter,
crier, murmurer,
imiter loiseau
qui sest envolé.
Prête-moi ton corps
juste une semaine
pour que je renaisse,
pour que je comprenne
la vie indolore.
Je serai alors
un autre moi-même.
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(17) HAÏKU 136
Appel dun voyage
qui lattire un soir dautomne
vers dautres rivages
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(18) CLICHÉ ?
Non, ce nest pas un cliché
ni le titre
dune chanson.
La vie ne sera jamais
un fleuve,
un long fleuve tranquille,
la rivière qui sétire
en riant à lhorizon.
Cest un voyage au long cours,
entre monts et précipices,
étendues plus apaisées,
ou bois parfumés dépices.
La vie est comme un torrent
qui bondit de pierre en pierre,
malmenée les soirs de vent,
du printemps jusquà lhiver.
Pour retourner à la source,
remontons le fil du temps,
à lécoute
coûte que coûte
de leau et de ses mystères.
Tant de jours à la déroute,
de nuits de feu et de fer.
La vie ne sera jamais
un fleuve,
un long fleuve tranquille,
un bouquet dîles
toutes neuves
au milieu de locéan.
Quelquefois elle se pose
sur les berges dun étang,
le temps dune pause
sans lombre dun ouragan.
Parfois elle reste en suspens...
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(19) HAÏKU 137
Ton chant me rassure
quand les vagues minterpellent
Sans une imposture
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(20) TÉMOIGNAGE
Le timbre dune contrebasse
résonne entre les troncs noircis
sans préavis.
Il reste encore quelques traces
quun musicien a déposées
dans la vallée.
Le temps peu à peu les efface
ne laissant que le fil des jours
aux alentours.
Le timbre de la contrebasse
nétait peut-être quun message,
le témoignage dun autre âge.
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(21) DÉSENCHANTEMENT
quadruple haïku
Désenchantement
quand on réalise un soir
quil est bien trop tard
Désenchantement
quand lespoir à lhorizon
nest quune illusion
Désenchantement
quand la vie se désagrège
en quelques arpèges
Réenchantement
à la lisière dun rêve
Un souffle sélève
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(22) LAC OUBLIÉ
Entre là
entre les entrelacs
dune image controversée
dans lantre dun lac oublié.
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(23) HAÏKU 138
La grille est fermée
Les pas se sont éloignés
et tu restes seul
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(24) HAÏKU 139
Où sont tes racines
que tu fuis sans le savoir
quand le jour décline ?
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(25) J'AI SUIVI LA RIVIÈRE...
Jai suivi la rivière
entre les arbres fous,
fous de joie,
fous despoir
ou de chagrin amer.
Je ne lai pas longée,
je lai juste suivie,
ne sachant si un jour
elle disparaîtrait
au pied dun arbre creux
ou derrière un rocher.
Là où elle était née,
il y a si longtemps.
Où elle avait souri
à la source de vie
qui est commencement,
séloignant peu à peu
vers une fin lointaine,
un immense océan
de courants et d'écume.
Jai suivi la rivière...
Je ne suis que le vent.
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(26) FLEUR DE MÉTAL
Il ne restait quun mur
dressé dans les sous-bois.
Un mur sans raison dêtre,
symbole dune époque
à présent révolue.
Un vieux mur isolé
qui avait survécu.
Le ciment seffritait,
grignoté par le lierre ;
les pierres regagnaient
lentement la lumière.
Seul un ventilateur
simaginait utile
quand le souffle des bois
glissait entre les pals,
les six pals immobiles.
Il ne restait quun mur
et la fleur de métal
figée sans émotion,
la fleur aux six pétales
ignorant les années
que le temps égrenait
et lhumeur des saisons.
Une fleur éternelle
qui un soir de grisaille
rejoindrait lhorizon
fuirait à tire-daile.
Il ne resterait quelle
sur un morceau de ciel.
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(27) RIRE DE NEIGE
chanson
Le soleil a posé
des flammes sur les feuilles.
La neige de la nuit
sest soudain mise à rire.
Un rire de clochette
pour effacer le deuil
dun automne précoce
qui commence à senfuir.
Avez-vous entendu
le rire de la neige
bondissant sur les branches
et le sol qui craquelle ?
Il éclate, léger,
égrène des arpèges
et se glisse, invisible,
sur un air de sittelle.
Quand la neige et les flammes
découvrent au matin
les sous-bois jaune et blanc,
tout paraît silencieux.
Mais le rire sélève,
tourbillonne sans fin
avant de disparaître,
se fondre dans le bleu.
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(28) ENCHEVÊTREMENT
Comment sy retrouver ?
Tout est entremêlé...
Un enchevêtrement
de fils et de pensées
qui soudain sinterposent
entre limaginaire
et la réalité.
Les idées sentremêlent
et lensemble est confus.
Lespace est envahi
par la velléité.
Comment sy retrouver ?
Le présent, le passé
glissent vers le futur...
Tout paraît embrouillé,
le temps simmobilise,
cerné par le chaos,
en un lieu limité.
Pour recouvrer le calme
et respirer enfin,
il suffit dune pause
ou dune éternité.
Etirer les couleurs
et retrouver le gris
dun monde sans écueils,
dun fleuve sans soucis.
Eloigner les pensées
pour mieux cerner le fil,
le fil à lorigine
dun embrouillamini.
Puis regarder sans peur
la vie écartelée
et modifier lespace
pour ne plus sy noyer.
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(29) AU CUR DUN VITRAIL
Lombre tressaille
au cur dun vitrail
quand le soleil
soudain la réveille.
Lombre sembrouille,
gémit, sagenouille.
Elle vacille,
senfuit, séparpille.
Lombre seffeuille,
le feu la recueille
sans la grisaille
au cur dun vitrail.
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(30) HAÏKU 140
Depuis ta naissance
tu télèves peu à peu
vers la connaissance
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(30) FACTICE
Tout avait changé,
tu ne reconnaissais plus rien.
Dans le bleu des arbres,
un merle sifflait son refrain.
Le jaune et le rouge
éclataient jusquà la lisière
des bois désertés
en bouquets de fleurs passagères.
Tout semblait factice.
Le passé sétait transformé
en couleurs primaires
qui navaient jamais existé.
Seuls restaient encore
quelques mares et leurs reflets
où tu retrouvais
celui que tu avais été.
Ann Rocard
NOVEMBRE
Photo de l'auteure
(1) HAÏKU 141
Le brouillard diffuse
le parfum gris de novembre
non loin de la cluse
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(2) QUELQUEFOIS
Quelquefois le chagrin tétouffe,
la vie seffrite,
la vie salarme.
Lespoir senvole et tu te noies,
submergé par tes propres larmes.
Tout nest que rouge, gris et noir.
Le silence devient vacarme.
Tu ne sais plus ce quil faut croire.
Quand le chagrin
séloigne enfin,
les trois couleurs virent au parme.
Tu te redresses
et redeviens
cet arbre droit
dont la confiance te désarme.
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(3) HAÏKU 142
Fixe la surface
quun soleil anamorphose
Le calme simpose
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(4) PUPILLE EN ÉVEIL
La pupille en éveil,
il pose sur le monde
un regard fait de peur
et despoir insensé.
Les hommes
ont-ils enfin
conscience que la Terre
court déjà à sa perte,
quil est temps de changer...
Changer au quotidien
notre façon de vivre,
dagir avec respect,
nos modes de pensée.
La pupille en éveil,
il fixe lavenir
qui semble séclaircir.
Rêve ou réalité ?
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(5) ARÔMES
Respire
larôme des sous-bois,
les feuilles rouges
aux reflets dor,
la mousse humide sous les doigts
et les effluves de bois mort.
Enivre-toi
de ces parfums
qui ne seront que passagers.
Lautomne depuis ce matin
séloigne sans se retourner.
Respire
larôme des sous-bois
et laisse-toi
ensorceler.
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(6) PRÉSAGE
Quelques feuilles tombées
sur un reflet de ciel.
Lombre des papyrus
qui laisse présager
un hiver infidèle
et la fin dune année.
Que sera la suivante ?
Sera-t-elle
différente ?
Nous fera-t-elle
rêver ?
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(7) HAÏKU 143
Va dans la forêt
rechercher ce qui nest plus
Le passé sest tu
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(8) PARTAGE
Arbre rouge
dans un monde bleu,
différent
et pourtant semblable.
Incompris
et parfois heureux
dexprimer
le cur dune fable.
Arbre rouge
venu dun autre âge,
dun pays
où tout était feu.
II voudrait
transmettre un message,
fait dun mot
ou peut-être deux.
Car ses feuilles
voleront bientôt,
éclats rouges
entre les nuages.
Deux syllabes
sen feront lécho :
un mot simple...
Tout nest que partage.
Ann Rocard
Dessin informatique de l'auteure
(9) AU SUJET DE L'AUTEUR
DE "MÉFIEZ-VOUS DE LA PANTHÈRE !"
(pièce policière déjantée)
Lauteur
nest pas à la hauteur
et lécrivain
écrit en vain.
Si la panthère
se désespère,
cest que lauteur autoritaire
lélimine sans commentaire.
Lécrivain
na rien de divin.
Et cest certain :
Qui trop enterre
est terre à terre.
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(10) HAÏKU 144
Vies à la dérive
avant lanémochorie
vers une autre rive
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(11) HAÏKU 145
Automne en sursis
quand tout redevient poussière
Couleurs solitaires
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(12) VIE PARSEMÉE DÉPINES
La vie est parsemée dépines.
Tu les évites
vaille que vaille...
Mais un soir,
quand souvre une faille,
tu ne peux plus les contourner.
Tu vas devoir les affronter,
même celles dont tu devines
lombre portée.
Tu te rebelles
et tu défailles...
Pourtant tu ne recules pas
et tu chemines
pour exister.
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(13) À CUR PERDU
Bientôt les arbres nauront plus
que leurs branchages pour pleurer.
Cette image aura survécu
le temps dun songe
ou dun mensonge
avant dêtre vite oubliée.
Vous quon aime et quon aperçoit
dans un reflet à cur perdu,
vous qui êtes partis trop tôt,
inaccessibles
et invisibles,
nous vous avons tant attendus.
Quand nous ressentons vos présences,
lémotion soudain nous étreint.
Nous écoutons votre silence,
mots de velours
au fil des jours,
votre rire sans lendemain.
Prenez nos mains,
séchez nos larmes
et suivons le même chemin.
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(14) FIXE LE CIEL
Fixe le ciel sans réfléchir,
laisse-toi porter par la brise.
Le soleil commence à pâlir...
Tu peux de nouveau lâcher prise.
Tu témerveilles, tu tétonnes...
Les feuilles rouges
et orangées
te bercent dun parfum dautomne.
Tu te sens soudain apaisé.
Fixe les couleurs et respire
le message qui sen évade,
vision de paix en devenir
douceur étrange
dune ballade.
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(15) HAÏKU 146
Au bout du tunnel
tu découvriras la paix
Rien nest irréel
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(16) HAÏKU 147
Des notes si pâles
qui serpentent dans le noir
Une nuit divoire
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(17) DESCENDRE UN ESCALIER
QUI A LES PIEDS DANS LEAU
Enlever ses souliers,
un jour gris comme un autre.
Descendre un escalier
qui a les pieds dans leau.
Puis regarder le fond
pour mieux sen imprégner.
Avancer à pas lents
dans leau déjà glacée
par le souffle du vent
et la fin dune année.
Observer les ridules
vibrant à la surface
dun lac en majuscule
à labri des montagnes.
Et recueillir limage
dun nuage égaré
entre deux feuilles mortes
pour laider à rejoindre
un ciel inespéré.
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(18) MIROITEMENT
Un éclat de lumière
entre les feuilles mauves,
et tu oublies soudain
la grisaille alentour.
Un éclat qui sétend
sur le lac, puis se sauve.
Et tu le suis des yeux,
sans fin, tu le savoures.
Tel un signe de paix
à labri dune alcôve,
il adoucit lespace
jusquà la fin du jour.
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(19) HAÏKU 148
Progresse à pas lents
sur les feuilles libérées
Et va de lavant
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(20) HAÏKU 149
Un seul mouvement
Le ciel se mêle à la terre
Où sont les frontières ?
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(21) EN DÉTRESSE
Le monde est en colère
et la tempête est proche.
Quand locéan proteste,
lespoir se met en berne,
les nuages rugissent,
les plages disparaissent.
Le monde est en colère.
La Terre en perdition
se révolte en silence
et ses larmes de feu
détruisent les forêts.
Il est temps quenfin cesse
lère dévastatrice,
cette ère anthropocène
que lhomme a laissée naître
en apprenti sorcier
et qui sest emballée
dans la folie ambiante.
Le monde est en colère
et les vagues gémissent
sous lassaut des tornades
consumant la lumière.
Dans la nuit dun hiver
qui ne finira plus,
un hiver éternel
si nous nagissons pas,
si nous baissons les bras.
La Terre est en détresse.
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(22) HAÏKU 150
Est-ce le message
à la tombée de la nuit
dun amour en cage ?
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(23) LENVIE DÉCRIRE UNE CHANSON
chanson
Le vent souffle des mots glacés
et les jardins soudain frissonnent.
La brume a déjà emporté
lor et le parfum de lautomne.
Refrain :
Un peu de rouge
au fond du cur
pour mieux lutter
contre la bise.
Un peu de couleur
dans les yeux
quand lhorizon
soudain se grise.
Un peu de chaleur
dans la nuit
pour voir la vie en rouge et vert,
pour y détecter la lumière.
Les baies des cotonéasters
colorent le vert des buissons,
donnent dans le froid de lhiver
lenvie décrire une chanson !
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(24) SURIMPRESSION
Sur le sable humide et nacré,
les nuages se sont posés,
laissant tes questions en suspens...
Où donc est linversion du temps ?
Le ciel sest immobilisé,
lécume nest plus que fumée,
tu vis en respirant à peine...
Quels sont les actes qui taliènent ?
Soudain tout paraît irréel,
le moindre secret se révèle,
et tu savoures,
hypnotisé,
cette vision instantanée.
Tu fais enfin partie dun tout.
La beauté est un garde-fou
qui te préserve,
un court instant,
de la violence et du néant.
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(25) HAÏKU 151
De longues nervures
sur un bout de parchemin
Que sera demain ?
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(26) AMITIÉ
Marcher à tes côtés,
sémerveiller ensemble
et percevoir le bleu
dune fleur du désert,
le sourire implicite
dun éclat de lumière
et les ombres de nuit
qui le soir se rassemblent.
Echanger quelques mots
si le cur nous en dit,
partager le silence,
un trille imperceptible,
des rêves sans limites,
des secrets indicibles...
Et savourer la joie
dêtre enfin réunis.
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(27) FLEURS ROUGES DE PONDICHÉRY
Triple haïku
Jaime les fleurs rouges
nées du bout de ton pinceau
Etranges oiseaux
Jaime leur parfum
fait de rêves et dépices
venu de si loin
Jaime leur présence
Symbole dune amitié
qui ne peut faner
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(28) HAÏKU 152
Les moutons sélancent
à lassaut dun ciel lointain
Envol incertain
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(29) FLEUVE NOIR
Le ciel gris sillumine,
mais quimporte ?
Un fleuve de boue noire
te déporte.
Fleuve de désespoir
qui te poursuit sans cesse
depuis que tu as fui
ton pays en détresse.
Les mains se sont fermées
et les regards gênés
se détournent
ou se ferment.
Ne restent que la boue
glacée sous la lumière,
le dessein aigre-doux
de quitter cet enfer.
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(30) HAÏKU 153
Parfois il ségare
et te fixe du regard
Sagit-il dun uf ?
Ann Rocard
DÉCEMBRE
Tableau de l'auteure
(1) DÉCEMBRE DE RETOUR
Décembre est de retour
en rouge et vert
sur les buissons.
A longs pas de velours,
brise de mer,
quelques flocons
dans un monde à lenvers.
Tu égrènes les jours,
lombre des mois
et des saisons.
Tu comptes à rebours
sans désarroi,
à lhorizon,
les années de sursis
et les chemins de vie
sans demander pourquoi
car tu nas pas le choix.
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(2) HAÏKU 154
Un dernier feuillage
avant sa disparition
est pris en otage
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(3) PAS UN SOUFFLE
Pas un souffle ce matin.
Juste un tintement
lointain,
teinté de bleu et de gris...
Lécho du silence inquiet,
murmure dune élégie
quand lannée touche à sa fin.
Pas un souffle entre les branches
une noire et quelques blanches
dune pâle mélodie...
Des notes imaginaires
qui senfuient
et se libèrent
enfin.
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(4) GO EST LENT SANS SON EGO
Jeu de go ou jeu de mots ?
Le goéland
nommé Go
voyage sur un cargo.
Mais Go est lent,
escargot
sans coquille sur le dos.
Le goéland,
tout de go,
lit Gogol et joue au go.
Loin du Golan,
Go... bingo !
senvole vers le Congo.
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(5) CYNORRHODON DE NOTRE ENFANCE
Notre chanson dautrefois
1- Cynorrhodon de notre enfance
quon attrapait dans les buissons.
On croyait quil nous portait chance,
il ressemblait à un bonbon.
Petit fruit rouge qui éveille
le souvenir dun grand soleil.
Refrain :
Notre grand-père,
toujours rieur,
les yeux plissés dans un sourire.
Notre grand-père,
main sur le cur,
qui nous a aidés à construire
tout un pays imaginaire,
pays de rêves,
pays de rires.
2- Notre grand-père lappelait
le gratte-cul, et il riait
en nous montrant quà lintérieur
se trouve du poil à gratter.
Il suffisait de le glisser
dans le cou de tous les rêveurs.
3- Cynorrhodon, rien que ce mot
ravive le clin dil complice
dun grand-père, ami des oiseaux.
Il était notre catharsis.
Nous avons tant de souvenirs
qui ne pourront jamais senfuir.
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(6) HAÏKU 155
Bouquet anonyme
esquissé un matin bleu
pour te dire adieu
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(7) PAR UNE NUIT D'HIVER
Par une nuit dhiver
la grêle sest posée
sur la vitre dun monde
en quête perpétuelle.
Par une nuit dhiver,
tu as imaginé
la carte vagabonde
où le flou se révèle.
Et cette nuit dhiver,
tu as su transformer
la surface dune onde
en espace virtuel.
Car cette nuit dhiver,
tu as réalisé
quune image féconde
est souvent essentielle.
Par une nuit dhiver,
tu as su tenvoler,
à peine une seconde...
La vie se renouvelle.
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(8) LA MER EST PARFOIS JAUNE...
La mer est parfois jaune
et ressemble à la plage
où le soleil ségare
croyant à un mirage.
Une mer isabelle
que les oiseaux survolent,
ocre ou souvent chamois
si la brume sétiole,
safran, bulle ou moutarde...
Ballade en si bémol
Tu nages sur le sable
et tu marches sur leau.
Tu franchis les limites
sans en avoir conscience.
La mer est parfois jaune,
emportant les bateaux.
Tu les suis, cette fugue
devient une évidence.
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(9) EMOTIONS
Envolée démotions
que tu ne sais plus contrôler.
Un soupçon de passion
et dinquiétudes au passé.
Mouvement incessant
qui te fait perdre tes repères.
Espérance ou tourment,
et ressentis complémentaires.
Ferme un instant les yeux,
laisse lorage séloigner.
Un instant silencieux
qui paraît une éternité.
Cueille tes émotions,
lune après lautre,
sans tégarer.
Pas une hésitation,
tu vas apprendre à élaguer.
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(10) QUELQUES MARCHES
Il suffirait de quelques marches
pour atteindre une porte ouverte,
découvrir celui que tu cherches
dans une retraite discrète.
Il suffirait de quelques marches...
Tu as grimpé tant descaliers
mais nas jamais trouvé lendroit
où tout pourrait recommencer.
Cétait ici, cétait ailleurs...
Un soir sachèvera ta quête.
Laisse les marches sestomper,
lespoir ta fait perdre la tête.
Oublie les rêves utopiques,
lattrait curieux des escaliers,
les fantasmes sans raison dêtre.
Les portes resteront fermées.
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(11) DANS LE BLEU DE L'HIVER
Rescapées du dernier automne,
deux ou trois feuilles sabandonnent.
Un éclat de chimères
dans le bleu de lhiver...
Des feuilles sur lesquelles
sécrit laube du temps ;
cette époque lointaine
qui ne sait plus comment
le monde a évolué
pour être maintenant
aussi violent quavant.
Rescapées du dernier automne,
les feuilles rient et sillusionnent.
Un soupçon de mystère
dans le bleu de lhiver...
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(12) HAÏKU 156
Le ciel se constelle
en un songe spirituel
de pensées profondes
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(13) HAÏKU 157
Marche droit devant
et quimporte la distance
En toute insouciance
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(14) CIPRIÈRE
Les cipres se dressent,
solitaires.
Pourtant semblables
dans le bayou.
Les pieds dans leau
dont les remous
font danser dans la ciprière
leurs doubles aux cheveux fous.
Et cette danse
qui séchevelle
depuis des siècles
se renouvelle
et murmure entre chien et loup :
De nous,
vous souvenez-vous ?
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(15) LEXTRAORDINAIRE DANS LORDINAIRE
Lextraordinaire
dans lordinaire
au quotidien.
Un mot, un regard
sans crier gare,
soir ou matin.
Lappel du voyage
dans les nuages,
mine de rien.
Un air de musique
mélancolique,
simple refrain.
Sourire en suspens,
rire denfant,
signe de main.
Lextraordinaire
dans lordinaire...
Souffle sans fin.
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(16) HAÏKU 158
Largue les amarres
et vis en apesanteur
nappé de brouillard
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(17) LA PÂLEUR DU SILENCE
La neige a déposé
la pâleur du silence
et ta vie devient danse.
Une danse immobile
où tout est intérieur,
où tout devient paisible
sans soupir ni pensée.
Tu palpes linvisible
dun univers feutré.
Les flocons égarés
tombent au ralenti.
La neige a déposé
un bien-être infini.
Même le temps seffile...
La notion de seconde,
de minute ou bien dheure
na plus de consistance.
Fixité hors du monde.
Le silence envahit
les recoins de ton être
et tu te sens renaître
quand le jour se fait nuit.
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(18) HAÏKU 159
Plus haut que les cimes
limmensité interroge
la mise en abîme
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(19) HAÏKU 160
Tu es vraiment mort
si je ne me souviens plus
de ce que tu fus
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(20) HAÏKU 161
Les rues silluminent
et soudain tu imagines
que lespoir renaît
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(21) HAÏKU 162
Entre chien et loup
à lorée de la forêt
Vénus apparaît
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(22) RÉJOUIS-TOI !
La mousse sur les branches
donne le la...
Réjouis-toi !
Notes rouges ou blanches
par-ci par-là...
Réjouis-toi !
Les flocons se déhanchent
au coin du bois...
Réjouis-toi !
Les rires se déclenchent,
alleluia...
Réjouis-toi !
La joie prend sa revanche
en mille éclats...
Réjouis-toi !
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(23) HAÏKU 163
Bouquet de nuages
qui seffile loin des crêtes
Voiles en partage
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(24) RÊVE DE NOËL
A travers une boule en verre,
tu observes le monde bleu,
rose et mauve dans la lumière
et tu murmures quelques vux.
Pour la paix
et le renouveau,
légalité et le partage,
le sourire sur les visages,
la musique dans chaque mot.
A travers une boule en verre,
tu vis le rêve de Noël
à laube dune autre frontière
et lespoir dune année nouvelle.
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(25) HAÏKU 164
Doù vient la lumière
quand ton cur sest enflammé ?
Dun désir nacré ?
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(26) COMPLÉMENTARITÉ NOIR ET BLANC
Est-ce un chemin de liberté
ou la progression personnelle
qui ne sarrêtera jamais ?
Une ascension vers le savoir,
la connaissance, la lumière,
léclat fugace d'une ombelle,
ou la complémentarité
en blanc et noir ?
Pour changer détat de conscience,
monte et descends cet escalier.
Plonge en toi-même pour mieux comprendre
ce qui te fera progresser.
Ces marches, dautres les ont faites,
les ont bâties ou bien creusées.
Emprunte encore
cet escalier.
Noublie pas de le rendre ensuite
pour mieux aider lhumanité.
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(27) HAÏKU 165
Les bulles sélèvent
Un souffle dair les irise
Tout se cristallise
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(28) SUR LES PAROIS
Chanson
Cétait il y a bien longtemps.
Pourtant tu ten souviens encore.
Tu écoutais le chant du vent
en provenance du grand Nord.
Dans les grottes de la vallée,
tu dessinais du bout des doigts.
Noir, ocre et blanc, beige ou doré...
Tu peignais ainsi les parois.
Cétait il y a bien longtemps.
Et dans ces grottes quelquefois,
je me réfugie, je tattends...
Il me semble entendre ta voix.
Je perçois des mots inconnus,
jimagine ta vie passée.
Je sais ce que tu as vécu.
Je suis ce que tu as été.
Cétait il y a bien longtemps.
Cest moi qui men souviens encore.
Et jécoute le chant du vent
en provenance du grand Nord.
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(29) HAÏKU 166
Un soleil hivernal
après une nuit étale
Nimbé de grisaille
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(30) HAÏKU 167
Ultimes reflets
près dune berge enneigée
quand lannée sachève
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(31) EN CETTE FIN DÉCEMBRE
En cette fin décembre,
le ciel sest embrasé
ne laissant présager
que des rumeurs obscures.
Espoir de jours nouveaux
fuyant lintolérance
ou crainte dune époque
submergée de violence ?
En cette fin dannée,
les nuages en feu
pointent le désarroi
de ceux qui nont plus rien,
quune simple illusion :
marcher, aller plus loin
pour découvrir enfin
un asile utopique,
un lieu inespéré
où ils sauront renaître
sans être rejetés.
En cette fin décembre,
les uns rient, dautres pleurent...
Certains nont que labsence,
la souffrance ou la peur.
Comment peut-on rêver
de conquérir lespace
et laisser des enfants
mourir le ventre vide ?
Comment lhumanité
peut-elle être inhumaine ?
Il y a tant dannées
que ces questions me hantent.
Saura-t-on y répondre
avant léternité,
saura-t-on partager
un avenir serein,
une terre commune...
vivre légalité ?
Ann Rocard
Ce soir s'achève ce challenge 2021.
Je vais relire ces POÈMES DE L'AUBE à tête reposée, avec le recul nécessaire.
J'espère transformer ce challenge en exposition de textes et d'images.
N'hésitez pas m'envoyer vos réactions (nouvelle adresse : annrocard14@gmail.com).
Demain commencera un nouveau challenge dont je n'ai pas encore choisi le thème...
Belle année à tous !
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