CHALLENGE 2021
LES POÈMES DE L'AUBE
de MAI à AOÛT
Un poème chaque matin...
MAI
Tableau de l'auteure
(1) HAÏKU 47
Un brin de muguet
Hume un parfum girandole
Tes rêves senvolent
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(2) LE DANSEUR AUX CERCEAUX
Il savance sur la piste,
le regard dans les étoiles.
Il est poète ou artiste
sur un tableau de Chagall.
refrain :
Quelques notes crescendo...
Il danse pour espérer
que le monde changera.
Crescendo decrescendo...
Il danse pour partager
lutopie dun au-delà.
Cest le danseur aux cerceaux,
danseur en apesanteur.
Il sélance... Glissando
sous le feu des projecteurs.
Le chapiteau disparaît.
Il est déjà en orbite,
plus sombre quil ny paraît,
et le voilà qui gravite...
Qui est-il ? Un funambule
dont on ignore le nom.
Plus léger quune plumule,
il sapproche dOrion.
Quand la musique sachève,
il se pose au ralenti.
Quelle était la part du rêve ?
Une pause à linfini.
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(3) QUAND LE JOUR EST MOROSE...
Va chercher ton pinceau
quand le jour est morose.
Etale sur le ciel
un peu dor et de rose.
Un soleil étonné
sans doute apparaîtra
dans la brume safran,
la mer senflammera.
Tu chasseras la nuit
qui tavait emporté
dans lunivers opaque
dun souvenir glacé.
Et tu effleureras
les nuages gris mauve...
Prends ton pinceau poème
et les ombres se sauvent.
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(4) SI J'AVAIS SUIVI LA VOIE...
Au bord des lèvres
un soupir...
Un murmure pour vous dire :
si javais suivi la voie
qui menait dans les sous-bois,
si javais vaincu la peur
de rester sur le sentier
craintive et abandonnée,
des années ou même une heure...
nous partagerions peut-être
la lumière et les broussailles
libérées des feux de paille,
nous aurions su reconnaître
un amour indéfini
sans mensonge ni déni.
Et jaurais chanté pour vous
les refrains de notre enfance
La vie serait une danse...
De nous, vous souvenez-vous ?
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(5) HAÏKU 48
Prisonniers sans noms
dont les visages seffacent
sans laisser de traces
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(6) GRAVÉE SUR UNE PIERRE
Tu la fixes des yeux,
toute ta vie est là,
gravée sur une pierre.
Un peu de gris, de bleu,
quelques taches lilas
et des touches de vert.
Les larmes et les rires
se répondent encore
après autant dannées.
Les regrets, les soupirs
qui nont pas su éclore
se sont tous craquelés...
Ta vie est un dessin
fait dombre, de lumière
et de jeux de couleurs.
Non, ne regrette rien.
Ramasse cette pierre,
ton chemin est ailleurs.
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(7) HAÏKU 49
Déstructuration
de lespace où lon chemine
au fil des saisons
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(8) AU BOUT DUN COULOIR INCONNU
La mort fait partie de la vie.
Cest une porte quon entrouvre
mais sans savoir ce quelle occulte.
Lultime porte dun parcours
qui fut trop long ou bien trop court.
Elle se dresse lumineuse
au bout dun couloir inconnu
où des voix sourdes nous appellent :
Viens, rejoins-nous,
viens, sans trembler.
nous serons là, à tes côtés.
La mort nest pas un être sombre
brandissant la faux du destin,
vêtu dune cape anthracite,
les yeux absents de leurs orbites.
La mort nest que le seuil étrange
dun monde doù lon vient peut-être,
luminescent et sans violence.
Quand la porte souvre sans bruit,
un chant doiseau se fait entendre,
on effleure à peine le sol
et lon senvole.
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(9) HAÏKU 50
Zapatéado
Danse au son des castagnettes
sans perdre la tête
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(10) LA MARCHE DES ARBRES
Les arbres lentement
se mirent à marcher.
Une forêt entière
où bruissait le feuillage.
Les arbres séloignèrent
vers un autre rivage
où des oiseaux mythiques
venaient de se poser.
Leurs chants vibraient sans fin
et les arbres dansèrent
jusquà laube des temps
une valse éphémère.
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(11) ENTRELACS
Entrelacs
ici ou là,
lacis dombre et de lumière
pour une vie passagère.
Enchevêtrement de fils,
de cordes qui se faufilent
et de brèches qui sentrouvrent.
Et à chaque croisement,
la même interrogation :
Quel sera donc le chemin
à suivre le lendemain ?
Les choix sont souvent multiples,
aiguillage sans aiguilles,
aiguillage sans destin.
Simplement une question,
une courte hésitation.
La voie que lon a choisie
nous mène vers une impasse
ou un chemin de traverse,
un sentier pâle et serein,
parfois un état de grâce.
Cest une nouvelle vie,
un tournant ou un virage,
envolée ou dérapage,
progression ou inertie.
Comment saffranchir des lignes
qui peu à peu nous enserrent,
tous ces fils qui nous relient,
nous enchaînent
ou nous unissent,
nous inquiètent
ou nous éclairent ?
Entrelacs
ici ou là,
lacis dombre et de lumière
pour une vie éphémère.
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(12) HAÏKU 51
Mer des origines
sous un ciel dencre de Chine
Où vont les bateaux ?
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(13) HAÏKU 52
Un filet deau fraîche
sur une main qui se tend
Hélice hors du temps
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(14) HAÏKU 53
Le merle sétonne
et pousse un cri jaune et noir
Valse sans mémoire
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(15) DE LAUTRE CÔTÉ DU DÉCOR
De lautre côté du décor
se dissimulent les acteurs
dune tragédie en puissance.
Est-ce la face ?
Est-ce lenvers
du décor où la vie sélance
sans se préoccuper dun monde
en déshérence ?
De lautre côté du décor
va et vient le metteur en scène,
manipulateur à distance
de silhouettes,
êtres de chair
dune histoire sans importance...
Qui saura un jour réagir
sans violence ?
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(16) HAÏKU 54
Nombrils de Vénus
sur un mur en expansion
Points de suspension
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(17) HAÏKU 55
Escalier dun soir
qui monte indéfiniment
Le blanc devient noir
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(18) HAÏKU 56
Lombre dun lézard
sur l'enclos qui se lézarde
nest que pur hasard
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(19) HAÏKU 57
Lhorizon bleuit
et les flammes disparaissent
Vagues de sagesse
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(20) DÉCOUPE DES NUAGES
Prends des ciseaux cuivrés,
découpe des nuages
faits de plumes légères
et de flocons de mai.
Dès que souffle la brise,
laisse-les senvoler
en un éclat de rire
que le soleil irise.
Puis suis-les du regard
par-delà lhorizon
et rejoins-les enfin
si ton âme ségare.
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(21) POURQUOI LES FLEURS ONT-ELLES
DES ÉTOILES AU FOND DES YEUX ?
La rose a perdu tout espoir
et ses épines se dévoilent.
Quattend-elle
le regard tourné
vers un ciel noyé de brouillard ?
Sourire amer
dun jour sans peine,
esquissé du bout des pétales.
Attentive au vent qui lentraîne
loin des écueils de lutopie.
Solitaire et désincarnée,
elle écoute un air de silence
et sinterroge de plus belle :
dis-moi pourquoi...
les fleurs ont-elles
des étoiles au fond des yeux ?
Au bord des cils,
la rosée perle.
Elle senivre du parfum
de laube sans fin refleurie.
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(22) HAÏKU 58
Les courants entraînent
aux confins de locéan
le chant des baleines
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(23) INCONSCIENT
La vie est un long fil
au-dessus dun ravin,
le parcours incertain
dun sentier invisible.
La lumière caresse
la cime des grands pins,
se perd jusquau tréfonds
des brumes de labîme.
Mais cette obscurité
sans cesse nous appelle.
On voudrait tant savoir
ce quelle dissimule.
Inconscient collectif
ou secrets personnels ?
On y cueille parfois
des pensées en dentelle.
La vie est un long fil
relié aux étoiles.
Il oscille,
il hésite
de laube au crépuscule.
Et quand la nuit sétend,
nous découvrons enfin
dinfimes étincelles
à labri du ravin.
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(24) EFFLEURE
Effleure du bout des doigts
la dentelle des sous-bois.
Papillonne, les pieds nus,
sur la mousse inattendue.
Embrasse de tout ton corps
le souffle qui sévapore.
Et caresse du regard
la cime des arbres noirs.
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(25) HAÏKU 59
Tout le bleu seffeuille
dans les reflets dun étang
Ciel en trompe-lil
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(26) CINABRE
Cinabre,
sang de dragon,
quand lhorizon sembrase,
que tout nest que passion.
Si ton cur est en feu
et ta vie est en flammes,
aie confiance en lécoute
de ta propre intuition.
La poudre de cinabre
se répand alentour.
Tu y puises la force
daffronter lindicible,
lénergie nécessaire
à ton chemin de vie.
Ses mots sont létincelle
dun départ différé,
le rouge sen empare
et ne fait que passer.
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(27) HAÏKU 60
Dessin ou collage
quand lorage sest enfui
Fantasmagories
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(28) LE CHAT POÈTE
Quand le soleil est double
séveille un chat poète.
Lui qui vient de si loin,
cette image le trouble.
Où est donc son jumeau
quil na jamais revu ?
Ce frère imaginaire
du signe des Gémeaux.
Sourire imperceptible
du bout de ses vibrisses,
le chat miaule des mots
pour cet autre invisible.
Le soleil séteindra
dans la nuit éternelle...
On entendra encore
les haïkus du chat.
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(29) HAÏKU 61
Laraignée solaire
tisse des grains de poussière
Toile allégorique
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(30) HAÏKU 62
La voie sans issue
qui mène vers linconnu
bruisse au crépuscule
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(31) OÙ T'EN VAS-TU ?
Où ten vas-tu
dans la brume dun soir de mai ?
Les derniers cris des goélands
éclairent un coin de mémoire,
le concert de temps révolus.
Tes yeux sourient sans trop savoir
quelle en est la raison profonde.
Tu abandonnes le rivage,
le cur léger, musique aux lèvres.
Où ten vas-tu
sans un regard vers le passé ?
Le jour séloigne à pas de loup
et ton corps effleure la mer
sans y laisser la moindre trace.
Quand tu atteindras lhorizon,
tu reverras en un éclair
un florilège éparpillé
dune vie déjà oubliée.
Ann Rocard
CHALLENGE 2021
LES POÈMES DE L'AUBE
Un poème chaque matin...
JUIN
Tableau de l'auteure
(1) Haïku 63
Non loin du récif
résonne un leitmotiv
venu de très loin
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(2) HAÏKU 64
Trois couleurs primaires
pour voir le monde à lenvers
et pleurer de rire
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(3) CARESSE ULTIME
Les derniers rayons sabandonnent
à la limite de léther
et le sable humide frissonne.
Une caresse avant la nuit...
Le rose soudain salanguit,
bercé de noir,
perlé de gris.
Caresse ultime au crépuscule,
rêve damour inassouvi,
lombre pâle dun funambule...
Etait-ce hier ou aujourdhui ?
Le jour nest plus,
le jour senfuit.
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(4) HAÏKU 65
Bourrasque de juin
Tourbillon dans un jardin
quand le soleil rit
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(5) LA NUIT SE POSE
Quelle heure est-il ?
La nuit se pose
et tu ne ressens plus grand-chose.
Tu erres depuis si longtemps
dans un monde qui se nécrose.
Tu avais cueilli sans y croire
une aventure à peine éclose,
tu lavais laissée senvoler
renonçant à la moindre osmose.
Après des années de silence,
tu avais trouvé porte close.
Tu ne peux changer le passé.
Il est temps de faire une pause,
de renoncer à lutopie
dun espoir qui se recompose.
Quelle heure est-il ?
La nuit se pose.
Les rêves se métamorphosent.
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(6) ALGUES
Nage improbable
dans locéan
au gré des marées et du vent.
Ballet incessant où le bleu
qui se mêle au noir et au vert,
tamise sans fin la lumière.
Appel silencieux des poissons
entre les algues nonchalantes
à lécoute dun chant lointain
que les baleines réinventent.
Danse ineffable
des laminaires
au rythme fluide des courants.
Valse des fougères de mer
dont les longs bras glissent, lascifs,
entre les ombres des récifs.
Quand soudain les fouets du sorcier
piègent un nageur solitaire,
leur danse sarrête un instant,
et le prisonnier se libère.
Nage improbable
dans locéan,
le temps sécoule, différent.
Tout près du sable,
yeux grands ouverts,
fasciné par le bleu persan,
bleu saphir ou bleu outremer,
le nageur poursuit son voyage...
Où est lendroit,
où est lenvers ?
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(7) HAÏKU 66
La haie de bambou
dissimule un horizon
où tout se confond
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(8) À DES ANNÉES-LUMIÈRE
Dans le mutisme des étoiles,
jai vu souvrir des fleurs sauvages.
Des mots lumineux jaillissaient
et je les cueillais sans ambages...
sans ambages.
refrain :
Jai vogué des années-lumière
pour savoir quelle était ma voie,
loin de chez moi,
loin de la Terre,
sans regretter ma vie dhier.
Sur les planètes de cristal,
jai rencontré dautres visages.
Car ailleurs la vie existait
dans ces étranges paysages...
paysages.
Dans les aurores boréales,
jai poursuivi ce long voyage.
Les rideaux verts se déplissaient
mais je nétais que de passage...
de passage.
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(9) HAÏKU 67
Envol de diaspores
portées par le vent du Nord
Le temps d'un soupir
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(10) HAÏKU 68
Que regardes-tu ?
Je ne suis que ton miroir
Tout est transitoire
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(11) TACHE-CACHE
Une tache
qui sert de cache...
Que dissimule ce rouge
masquant un monde qui bouge ?
Serait-ce la vérité
doù sévadent les pensées
de celui qui consciemment
souhaite se voiler la face ?
Sen tenir à la surface,
se noyer dans le mensonge,
se réfugier dans le songe,
lombre du renoncement.
Une tache
qui se détache
sur un fond sans fondement,
fait de noir et de grisaille,
de soucis vaille que vaille...
Tache sans discernement
pour fuir lavancée du temps
et la peur des retrouvailles.
Faut-il écarter les branches,
rechercher des plages blanches,
se glisser entre les feuilles,
découvrir un monde en deuil ?
Une tache
souvent trop lâche...
Car la prudence est de mise,
langoisse se cristallise.
Pas un seul pas en avant,
se contenter de linstant
où le rouge hésite encore
entre le sang et laurore,
entre le rire et les pleurs,
le bien-être et la douleur.
Une tache
sans que lon sache
qui la déposée un soir,
cachant un pan de mémoire.
Une tache
que lon arrache,
un matin sans hésiter
pour comprendre que la vie
nest plus ce quelle a été.
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(12) HAÏKU 69
Regrets dun étang
où la langueur sest posée
le temps dun été
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(13) HAÏKU 70
Pêcheur en attente
dun poisson imaginaire
vieux dun millénaire
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(14) PETIT ANIMAL LÉGENDAIRE
Il se détache
dun pan de mur
éclairé par un réverbère.
Etre animé
par un murmure
dont la nuit ne savait que faire.
Né dun graffiti crayonné
par un passant qui sennuyait,
il se faufile
de pierre en pierre...
Un simple éclat
dans lunivers.
Jaune et gris
avant que la pluie
ne lefface sans commentaire,
il sinterroge au moindre bruit,
pour lui la vie est un mystère.
Petit animal légendaire
qui fait lécole buissonnière,
il existe le temps dun rêve
à la lisière dun autre âge.
Il se promène, solitaire,
avant que la nuit ne sachève
et quune larme ne se pose
sur son passage...
Car il suffit de peu de choses
pour atteindre
la fin dun voyage.
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(15) HAÏKU 71
Senivrer de rouge
quand revient la floraison
du callistemon
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(16) OMBRES EN LIBERTÉ
Les ombres sur le mur
ont changé de visage.
Les feuilles découpées
sont devenues des plages
où le sable sécoule
en fonction des marées.
Et les feuilles sétonnent,
les ombres leur échappent.
Peut-on vivre sans ombre
quand le soleil éclaire
un reflet de soi-même ?
Une première étape
si le ciel devient sombre
pour mieux sinterroger.
Privées dintensité,
les feuilles plus légères
vont attendre lautomne
et senvoler enfin
rejoindre le rivage
où leurs ombres, sereines,
vivent en liberté.
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(17) MULTIPLICITÉ
Les visions se superposent
sans en comprendre le sens.
Sursauts le temps dune pause
et tout file à contresens.
Noir et gris sont submergés
par des traînées de couleur
quon pourrait croire égarées,
étirées à contrecur.
Les visions se multiplient.
Mais quel est donc le message
qui sans cesse les relie
dheure en heure,
de page en page ?
Le jaune entraîne le blanc,
et le bleu reste invisible.
Le rouge glisse, insouciant...
Pour lui, rien nest impossible.
Visions qui se répercutent
dans un univers de sons,
portées par un air de flûte
au rythme des percussions.
Flûte et percussions...
Percussions...
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(18) HAÏKU 72
Quand sourd la colère
le ciel fronce les nuages
Un mauvais présage
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(19) HAÏKU 73
La rosée sembrase
si lail dessine un matin
des ombres chinoises
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(20) HAÏKU 74
Parfum rose et bleu
des illets à la lisière
dun jour lumineux
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(21) MUSIQUE ANCIENNE
A labri au creux dun rocher,
lécho dune musique ancienne...
Grelot dune cloche fêlée,
grelot de pierre déformé.
Cétait au temps des longs voyages.
Accompagnés de quelques rennes,
ils marchaient vers dautres rivages,
traversaient des contrées sauvages.
Ils chantaient pour sencourager
au fil des jours et des semaines,
au son des cloches quils avaient
tout simplement imaginées.
Une pause sous un abri
de roches antédiluviennes...
Ils regardaient le ciel de nuit,
les étoiles à linfini.
A labri au creux dun rocher,
résonnent mille cantilènes,
la nuit du solstice dété.
Ne bougez plus et écoutez...
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(22) LARMES DE SEL
La mer pleure
des larmes de sel
depuis larrivée imprévue
dun oiseau gris aux longues ailes.
Est-ce un oiseau de bon augure ?
Dans ses pupilles anthracite,
lavenir se lit à voix nue.
Un futur qui nous précipite
là où la vie ne sera plus
quun souvenir évanescent,
le mythe dun passé lointain,
quand lécume
dansait sur les vagues
et la mer riait aux éclats,
chaque matin.
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(23) RITOURNEIGE
Il neige des fleurs dété
quand la lune disparaît
dans lobscurité.
Il neige un espoir opale
que distillent les pétales
au chant des cigales.
Il neige une ritournelle...
Une effraie déploie ses ailes.
Songe intemporel.
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(24) PRÊCHE DUNE PÊCHE
La pêche est un péché
que lon croque en été
en rentrant de la pêche.
Rien ne nous en empêche.
Mais dans une dépêche,
la pêche se dépêche
sans se fendre la pêche
de prêcher que les pêches,
oui les fruits du pêcher
ne sont pas des péchés.
Jamais un pic épeiche
ne pourra les pêcher
au sommet des campêches,
même sil a la pêche !
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(25) HAÏKU 75
Des rais de lumière
dans la nuit inexistante
Lété se libère
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(26) HAÏKU 76
Couleurs improbables
emportées vers locéan
au fil du courant
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(27) IMAGI-MER
La mer a dessiné
des ombres sur le sable,
algues abandonnées
après une tempête.
Un peu de rose et mauve
quand la nuit nest pas loin,
et les ombres se mettent
à tanguer sur la plage.
Limagi-mer entraîne
nos rêves au lointain
vers un futur instable,
lendemain incertain
quon souhaiterait meilleur.
A la marée prochaine,
la mer déplacera
les algues voyageuses,
et les ombres seront
sans doute différentes,
pourtant à la même heure...
Soupçon dimagi-mer
quand à la fin du jour,
le noir se mêle au rose,
le rose
berce le noir
et nous conte une histoire.
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(28) BRUME MATINALE
La brume
caresse les falaises
et sinsinue entre les roches.
Elle contourne les buissons,
apaise les herbes sauvages...
sans anicroche.
La brume
se glisse entre les branches
pianissimo... et se rapproche.
Elle envoûte chaque recoin,
entrelace les apparences...
sans un reproche.
La brume
efface les limites,
elle étouffe le son des cloches.
Elle enchante lair en suspens,
pose des perles de silence...
et seffiloche.
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(29) DÉAMBULATION (triple haïku)
Déambulation
dans un marais inconnu
Quelle est ta mission ?
Déambulation
Seule ta voix te répond
Tout est vibration
Déambulation
Cette époque est révolue
Je ne te vois plus
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(30) MÉMOIRE
La mémoire se décompose
en fragments de mondes épars.
Il ne restera plus grand-chose
quand les arpèges
dune cithare
séteindront comme la lumière
à la surface de la mer.
La mémoire se décompose
et tu ne sais plus si tu es
cette statue qui sankylose
tel un phare
dressé sur le quai.
Peu à peu senfuit la lumière
semant des souvenirs amers...
Jaunes et roses.
Ann Rocard
CHALLENGE 2021
LES POÈMES DE L'AUBE
Un poème chaque matin...
JUILLET
Tableau de l'auteure
(1) HAÏKU 77
Jai vu un chat peindre
un espace bleu et vert
Nouvel univers
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(2) QUAND LES OISEAUX SE DÉSALTÈRENT...
Le ruisseau sest mis à parler,
un matin bleu dans les sous-bois.
Un été plus doux que la soie
venait juste de commencer.
Ecoute chanter le ruisseau,
leau qui ruisselle sur les pierres,
ses mille et un colliers de mots
quand les oiseaux se désaltèrent.
Le ruisseau murmure à toute heure
ce que tu nas pas su me dire,
les mots dun langage intérieur
qui ont fini par sévanouir.
Le ruisseau sest mis à parler,
un matin bleu dans les sous-bois.
Peut-être entendras-tu sa voix,
mais sauras-tu ten imprégner ?
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(3) Haïku 78
Envol de nuages
tel un vol gris doies sauvages
par-delà les songes
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(4) HAÏKU 79
Coulées dencre noire
quun peintre a su libérer
Est-ce aléatoire ?
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(5) À FLEUR DE PEAU
Hypnotisé par son tableau,
il ne pouvait plus détacher
son regard de limmensité
qui lattirait,
à fleur de peau.
Le ciel lui paraissait soudain
à portée dun vol migratoire.
Il se voyait partir un soir
à tire-daile
vers son destin.
Il ressentait le souffle chaud
et la caresse des nuages,
lappel dun éternel voyage
Il avait lâme dun oiseau.
Il tendit lentement les bras
couverts de plumes
imaginaires,
puis profitant dun courant dair,
sans hésiter,
il senvola.
Si tu observes son tableau,
tu distingues la silhouette
dun homme,
parti à la conquête
dun univers à fleur de peau.
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(6) Haïku 80
Dissémination
vers tant de lieux inconnus
darômes diffus
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(7) ÉMERGENCE
Doù vient cette étrange lumière
vibrant au cur dun paysage
quun peintre avait tracé naguère
sur cette page ?
Elle émerge de linconscient
dun être qui rêvait de suivre
un sentier noir,
semé de blanc,
pour mieux survivre.
Quelques taches dencre de Chine...
Lémergence de souvenirs,
perdus depuis les origines,
et lon chavire.
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(8) SIMPLE BALLADE BRETONNE
La mer
anime les pierres
dans une crique isolée
où nous aurions pu marcher
si nos voies avaient été
la même.
refrain :
Quand les pierres se colorent
à la marée montante,
jégrène un ancien accord
que je réinvente.
La mer
donnait un concert.
Nous nous étions éloignés.
Nous aurions pu lécouter
et nos voix auraient chanté
« Je taime »...
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(9) HAÏKU 81
Impression fugace
dun ciel qui se restructure
en un long murmure
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(10) HAÏKU 82
Un fleuve séloigne
sans regarder le passé
La page est tournée
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(11) HAÏKU 83
Londe se colore
Variations involontaires
sous un ciel lunaire
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(12) PHÉNIX
A lorée dun sous-bois,
tu observes le monde
qui renaît de ses cendres.
Phénix aux plumes dor
qui séveille étonné
sur la carte du Tendre.
A lorée dun sous-bois,
tu perçois la caresse
dun long bruissement dailes.
Et lenvol du Phénix
te permet d'approcher
un lieu immatériel.
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(13) HAÏKU 84
Visages sans noms
sur les routes de lespoir
Quelle est leur histoire ?
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(14) HAÏKU 85
Noffrez plus des fleurs
mais de gros choux bicolores
Vrais porte-bonheur
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(15) ÉVANESCENCE
Des frontières dune âme
en errance éternelle,
il ne reste quune ombre
confuse ou irréelle.
Si tu fixes le sol,
tu percevras peut-être
sa présence insolite
qui ne pourra renaître.
Ce nest quune illusion,
le frisson dun mirage,
les vestiges grisés
rescapés dun autre âge.
Offre-lui cependant
une dernière chance
et fais semblant de croire
à son évanescence.
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(16) SANG DESSUS DESSOUS
Tout est sens dessus dessous,
six cent six sous sont ici.
Samson, censé sen soucier
sans façon ni facétie,
suce une glace au cassis
sans cesser de ressasser :
six cent glaces
ou six cent six,
cest ainsi et cest assez !
Est-ce le sang de Samson,
le sang de six cent sangsues
ou le sang dun cétacé
qui sent le sorbet sucré ?
Tout est sens dessus dessous...
Cest sûr, le sang se dissout.
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(17) HAÏKU 86
Un soir comme un autre
jai libéré les nuages
qui vivaient en cage
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(18) DÉSOLATION
Cétait un monde sans partage
où régnait la désolation,
cet être rouge anthropophage
qui décimait les environs.
La guerre avait semé la mort,
on ne savait plus à présent
qui survivrait dans ce décor
de larmes, de cris et de sang.
Ce fut un monde de partage
avant larrivée dun tyran
qui réduisit en esclavage
ceux qui nétaient pas de son camp.
Certains résistèrent longtemps,
dautres furent robotisés.
Je nétais alors quun enfant,
mais je ne loublierai jamais.
Je me battrai jusquà ma mort
pour recouvrer la liberté,
chasser ce tyran que jabhorre,
délivrer mon pays blessé.
Ce fut un monde de partage
qui ne demandait quà renaître.
Je nen dirai pas davantage,
lespoir senfuit par la fenêtre...
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(19) HAÏKU 87
Quattends-tu encore
lorsque lhorizon sendort ?
Rien nest impossible
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(20) HAÏKU 88
Le sel de la vie
est celui que lon savoure
à la fin du jour
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(21) ROCHES À PERTE DE VUE
Il gravit des montagnes
sans savoir où aller.
Quelle était la limite
à lhorizon du monde ?
Des fissures géantes
labouraient les rochers.
Il recherchait son ombre,
elle sétait enfuie
un matin sans raison
dans la brume profonde.
Il gravit des montagnes
qui nen finissaient plus
de monter et descendre
en un rythme effréné.
Râpeuses sous la main,
pourvues dun cur de pierre,
ces roches
étaient pour lui
son unique univers.
Atteindrait-il un jour
lendroit dont il rêvait,
antique havre de paix
plus loin que les montagnes,
les ravins, les déserts ?
Et pourrait-il enfin
sasseoir, face à la mer,
puis retrouver une ombre
dans son jardin secret.
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(22) HAÏKU 89
Vivre dans lespoir
dune rencontre imprévue
est une bévue
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(23) HAÏKU 90
Lété papillonne
Mais où sera-t-il passé
quand viendra lautomne ?
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(24) TORRENT
Le torrent bondit
de rocher en rocher.
Parfois il sennuie,
ségare volontiers
entre le gris des roches,
lor dun bouquet détoiles,
lombre qui seffiloche,
les nuées de spirales.
Le torrent senfuit
loin des sentiers battus.
Instinct de survie,
attitude ambiguë ?
Epris de liberté,
le voilà qui dérive
en des lieux ignorés
sans barrières ni rives.
Le torrent sourit,
parsemé de diamants.
Sans cesse, il poursuit
son rêve entre les champs.
Nuit et jour, il murmure
la légende de leau
et ses éclaboussures
deviennent des ruisseaux.
Le torrent bondit
de rocher en rocher.
Le torrent senfuit...
Comment le retrouver ?
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(25) HAÏKU 91
Respire un instant
le varech et les embruns
Respire et attends
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(26) HAÏKU 92
Des fleurs dagapanthes
de Bretagne en Normandie
Caresse enivrante
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(27) DEUX OMBRES
Deux ombres sous lemprise
dune vie de mensonges,
dagressions et dabsences.
Deux ombres séparées
par tant de maltraitance
quil serait impossible
de ne plus y penser.
Deux ombres déchirées.
Lune qui se raccroche
à lespoir insensé
dune éclaircie soudaine.
Lautre regarde ailleurs.
Aucune compassion.
Seul le mépris demeure.
Deux ombres en prison.
Quelques années plus tard,
ne reste que limage
vieillie et un peu floue
de ces ombres perdues.
Mais le temps ne peut pas
effacer les blessures,
les cris et les injures
qui se sont incrustés
dans le corps et lesprit,
laissant des taches noires,
une faille profonde
au fond de la mémoire.
Deux ombres qui senfuient.
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(28) HAÏKU 93
Qui lance une pierre
dans leau bleutée de létang ?
Peut-être le vent
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(29) HAÏKU 94
Une courte pause
sur la feuille de figuier
Dernière envolée
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(30) RACINES
Suis du doigt les racines
qui mènent aux origines
dun monde rouge et noir
où sinventent des histoires.
Contes dun jour de fête,
légendes sans queue ni tête.
Quand la neige prend feu,
récits les yeux dans les yeux.
Suis du doigt les racines,
puis lentement imagine
une épopée antique,
un univers fantastique.
Plus loin que lhorizon,
un peu dimagination...
Et tu rêves soudain
de bien d'autres lendemains.
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(31) HAÏKU 95
Si le jour se lève
après une nuit trop brève
nie le cours du temps
Ann Rocard
AOÛT
Tableau de l'auteure
(1) LARMES D'HORTENSIAS
Le ciel avait pleuré
des larmes dhortensias
et le bleu sécoulait
sur les buissons épars.
Les fleurs papillonnaient,
la pluie donnait le la,
le chagrin des pétales
senfuyait quelque part.
Le ciel avait pleuré
des larmes dhortensias.
Le mauve et le violet
se mêlaient aux tons roses.
Avait-il des raisons
de fuir, cet été-là ?
Le ciel croyait encore
à la métamorphose.
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(2) HAÏKU 96
De quelle planète
rêvent les anachorètes
épris dimpossible ?
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(3) DANS SON SILLAGE
Chanson
1- Il a laissé dans son sillage
les souvenirs du temps passé,
la silhouette dun village
où vivaient ceux quil a aimés.
Il est parti faire un voyage
quil avait idéalisé.
Cétait un soir sur le rivage,
il pleurait des larmes de jais.
refrain :
Plus loin,
toujours plus loin
sans jamais se retourner.
Où sont le début et la fin
dun rêve désenchanté ?
2- Il embarqua sans un regret
sur une barque de fortune.
La mer criait, le vent soufflait
se moquant des rayons de lune.
Près de lui, des ombres ramaient,
ignorant qui était Neptune.
Par moments, il les remplaçait
pour partager leur infortune.
3- On le surnommait « le migrant » ;
ils étaient déjà des millions
à espérer vivre autrement,
découvrir dautres horizons.
Il traversa au fil des ans
des mers, des pays, des régions...
Rejeté la plupart du temps
sans même prononcer son nom.
4- Après plus de vingt ans derrance,
il voulut retourner chez lui.
La vie navait plus aucun sens.
Quétait devenu son pays ?
Mais pendant ses années dabsence,
la guerre hélas avait détruit
les souvenirs de son enfance.
Tout était noir comme la nuit.
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(4) HAÏKU 97
Valse impressionniste
de mille coquelicots
quun futur attriste
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(5) HAÏKU 98
A travers la roche
une vision illusoire
dun gris sans reproche
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(6) HAÏKU 99
Parfum de varech
Deux goélands sinterrogent
et claquent du bec
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(7) HAÏKU 100
Un matin dété
le ciel se mêle à la terre
Quel est ce mystère ?
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(8) HAÏKU 101
Tout se détériore
Le monde est en perdition
sans le moindre port
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(9) LÉTANG DE TES VINGT ANS
chanson
1- Suis le sentier des roches grises
jusquà létang
de tes vingt ans.
Là où les pensées se divisent
en bleu et rose (bis)
quand la solitude
tindispose.
refrain :
Sur la rive des souvenirs,
tu discernes quelques images
dans les reflets dun ciel saphir.
Ce nest sans doute quun mirage...
2- Cest au fil des ondulations
perlées de fleurs
venues dailleurs,
que tu entendras la chanson
de votre amour (bis)
qui navait jamais vu le jour.
3- Suis le sentier des roches grises,
longe létang
de tes vingt ans.
Lombre des roseaux samenuise...
Tu imagines (bis)
une autre histoire
qui se dessine.
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(10) HAÏKU 102
Un bouquet décume
à laube dun jour nouveau
Bribes damertume ?
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(11) SOLEIL AU CUR DUNE SOUCHE
Un soleil sest glissé
dans le cur dune souche,
à la fin de lété
quand le vent seffarouche.
Un soleil en spirale
qui sest mis à danser
sur un air de cristal
jusquà laube nacrée.
Ceux qui lont aperçu
ont cru quil sagissait
dune illusion perdue
ou dun rêve secret.
Un soleil sest éteint.
A-t-il pris son envol ?
Il ne reste au matin
quune pâle luciole.
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(12) HAÏKU 103
A cause dun vouge
les larmes dun arbre rouge
séchées par le vent
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(13) HAÏKU 104
La mer anthracite
nous emporte en un instant
Aucune limite
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(14) HAÏKU 105
Un air de guitare
ségrène quand vient le soir
sur les feuilles grises
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(15) CYCLONE À LHORIZON...
Chanson
1- Si le vent furibond
se met à tournoyer,
pose-toi la question :
qui la donc déclenché ?
Naccuse pas toujours
Eole ou bien Zéphyr,
car lhomme est un vautour
qui fait souvent bien pire.
refrain :
Cyclone à lhorizon
et forêts qui sembrasent...
Cherche la solution !
Fais vite table rase
sur tout ce qui détruit
la nature et la vie.
Est-il déjà trop tard
pour un nouveau départ ?
Garde espoir et agis,
la Terre est en sursis.
2- Lhomme apprenti sorcier
manie tant de baguettes ;
le climat déréglé
engendre des tempêtes.
Destruction, pollution...
Il ne respecte rien
sans poser la question
dun futur incertain.
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(16) CORAIL VAILLE QUE VAILLE
Jai rêvé cette nuit
que les fleurs de corail
dansaient de tous côtés,
valsaient vaille que vaille
au milieu des montagnes,
des collines sans fin
en sifflant sans répit
un éternel refrain.
Jai rêvé cette nuit
dun récif oublié
au fond dun océan
encore inexploré.
Loin de lemprise humaine,
en un lieu anonyme
survit un univers
protégé par labîme.
Mais ce nétait quun rêve...
Les fleurs se sont fanées
quand jai ouvert les yeux
et me suis éveillée.
Le corail nétait plus
quune image factice.
La danse imaginaire
a rejoint les abysses.
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(17) SAISIS LA BRANCHE
Tends la main et saisis la branche
qui pourrait taider à survivre.
A quoi cela servirait-il
si personne ne te délivre ?
Tu tinterroges
et tu hésites
car le bonheur nétait quun mythe.
Tu écoutes
un froissement dailes,
une pierre tombée du ciel...
Autour de toi, tout est inerte.
Quel est ce monde que tu fuis ?
Tends la main, cette tache blanche
est une image qui sourit.
Tu ne pourras pas effacer
tes blessures par le déni.
Leau tenveloppe...
Dans ce linceul
tu ne te sens pas vraiment seul.
Tu écoutes
le chant du courant,
lappel rauque dun goéland...
Et tu tabandonnes soudain
sans proférer le moindre cri.
Plus de main... La branche séloigne
et je nai rien fait pour taider.
Tu as rejoint dautres rivages
un soir dété.
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(18) HALLUCINATION
Ce fut un rêve de lumière
bercé de rayons éphémères.
Les soleils éclataient sans cesse...
Effets de joie ou bien divresse ?
Un rêve drôle et coloré
où les soleils sont orangés,
posés sur des pierres sans lune
et des branchages de fortune.
Parmi les pierres bleues ou vertes,
une fenêtre sest ouverte ;
celle qui mène aux illusions
et à la réincarnation.
Qui rêve ainsi dans la pénombre ?
Qui se faufile entre les ombres ?
Ce nest quune hallucination,
un songe en vers ou en chanson...
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(19) HAÏKU 106
Sans te retourner
va de montagne en vallée
jusquà locéan
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(20) QUAND UN CANARD CANCANE-T-IL ?
Elle a plongé sans attendre
et la surface a vibré.
Que cherchait-elle à surprendre
dans leau du dernier été ?
Lui, le plus beau des canards
dans son monde dévoyé
vivait un nouveau départ,
la fin dune éternité.
Il restait imperturbable,
le regard fixe et glacé.
Un instant insaisissable
où leur vie sest arrêtée.
Quand cancanera-t-il
au son dun french cancan ?
Il a choisi son camp
Quant à elle...
quen est-il ?
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(21) HAÏKU 107
Danse de jets deau
dans un bassin oublié
Semblables aux roseaux
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(22) VAGUE EN VOGUE
Va et vogue
sur les vagues.
Tout est vague
et en vogue.
Tu divagues
sans prologue.
Tu dialogues
ou zigzagues.
Tu dis : « Gag ! »
dun ton rogue,
tel un dogue.
« Non, sans blague ! »
Pas de bague
ni de bogue.
Pas de tog
ni de tag.
Epilogue ?
Tu tévagues
à la Hague
et tu blogues.
Va et vogue
sur les vagues.
Tout est vague
et en vogue.
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(23) HAÏKU 108
Quelques touches roses
sur un muret de granit
et le temps lévite
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(24) HAÏKU 109
Les vagues sélèvent
pour atteindre les frontières
dun monde sans trêve
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(25) TRANSFIGURATION
Nuit profonde.
Les flammes se déstructurent,
images recomposées
dun boléro déchaîné.
Qui sexonde
dune sombre sépulture ?
Lesprit dun peuple oublié
qui avait tout partagé.
Vagabonde
quand le feu le transfigure,
il peut enfin sélever
plus haut que la Voie lactée.
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(26) ÉPHÉMÉRIDE
Un jour qui ne ressemblait
à aucun autre jour.
Un jour où la vie sétait
transformée pour toujours.
Cétait un jour du mois daoût,
blotti dans le brouillard,
enveloppé par le doute
et laissé au hasard.
Jour marqué dune croix blanche,
plutôt dune croix noire,
suivi par une avalanche
de cris de désespoir.
Léphéméride dun jour
qui dannée en année
est un appel au secours.
Sombre calendrier.
Sur cette liste polaire,
et gravée quelque part,
trop de souvenirs amers,
de rêves qui ségarent.
Effeuille léphéméride
pour mieux ten libérer.
Lavenir sera limpide.
Savoure enfin lété.
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(27) COLÈRE
Cette colère
qui sourd en moi :
elle est la ronce
qui égratigne,
et les nuages noirs de jais
qui sagglutinent
avant lorage.
Cette colère
est quelquefois
la rose sombre
et ses épines,
lortie tapie dans un fossé,
à lorigine
dun vieux message.
Cette colère,
je la combats
depuis longtemps
et jimagine
quelle saura être effacée,
mise en sourdine...
Tourne la page.
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(28) QUI SUIS-JE ?
Qui suis-je ?
Cest la question quavait posée
mon image dans le miroir.
Elle me ressemblait sans doute,
pourtant elle était différente.
Elle avait croisé tant de rêves
et visité dautres histoires.
Elle savait tout de ma vie
et de mes pensées qui séventent.
Qui suis-je ?
Elle aurait pu dire :
Qui es-tu ?
Le tu ne lui ressemblait guère.
Elle a cru que je préférais
répondre en la dévisageant.
Cheveux de blé, teint de Viking,
regard ému, regard de mer.
Et cette faille imperceptible
quand le sourire se fait vent.
Qui suis-je ?
Jai préféré ne pas répondre,
laisser les phrases en suspens,
car elle ne nétait que mon double,
prisonnier derrière une glace.
Un jour peut-être, nous pourrons
emprunter les couloirs du temps,
prendre le risque sans pareil
déchanger notre face-à-face.
Qui suis-je ?
Moi aussi, je demanderai
à mon image de répondre.
Es-tu celle que jai été,
âme perdue, cur en errance,
avant de fuir et décider
de ne jamais plus te morfondre ?
Es-tu enfin celle qui rit
et peu à peu reprend confiance ?
Qui suis-je ?
Je te regarde et te comprends,
tu peux me rejoindre ce soir.
Je ne suis plus cet autre moi
qui na jamais su évoluer.
Duo conscient et inconscient...
Viens, tu peux franchir le miroir
dans la complémentarité.
Nous sommes celle
que jai sauvée.
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(29) HAÏKU 110
A lombre dun mur
la rengaine dun moulin
qui grince et perdure
Ann Rocard
Photo de l'auteure
(30) Haïku 111
Eblouissement
quand le soleil te surprend
et que tu chavires
Ann Rocard
Tableau de l'auteure
(31) UN PARFUM QUI T'ENVELOPPE
Lodeur des feuilles de tomates
tenveloppe ce matin gris.
Ferme les yeux pour tévader,
laisse de côté tes soucis.
Les soucis ne sont que les fleurs
qui rient en cette fin dété,
des taches floues, éparpillées,
si loin de ton jardin secret.
Hume le parfum des tomates.
Oublie toute réalité.
Il suffit de quelques instants,
saisis cette opportunité.
Tu deviens soudain si léger,
tu sens le souffle qui thabite
avant de reposer le pied
dans un univers qui seffrite.
Ann Rocard
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