Solitudo
Ann Rocard
Courte nouvelle (écriture automatique) qui accompagne le triptyque SOLITUDE :
ÉCLOSION (Solitude I) - Ann Rocard - 2014
FOISONNEMENT (Solitude II) - Ann Rocard - 2014
APAISEMENT (Solitude III) - Ann Rocard - 2014
Solitudo
Ann Rocard
Le sentier serpentait dans la forêt où personne ne saventurait plus depuis des siècles. Le regard vide, la jeune femme sétait égarée et nétait plus que lombre delle-même. Une ombre sans soleil, de plus en plus pâle, aux contours à peine perceptibles. Ombre dans la pénombre. Sa propre silhouette avait disparu au détour dun grand chêne. Cet arbre voûté, à bout de force. Ce chêne qui demandait grâce, suppliait quon le libère de ses chaînes.
La silhouette avait disparu ne laissant que son ombre. Au même instant, le chêne rendit lâme, les larmes de son corps centenaire... et il se laissa choir sur un lit de broussailles. Lombre fit un bond en arrière, échappant de justesse à la dislocation. La clairière, créée par la chute, fut envahie de lumière, et lombre brilla dun noir de jais.
Elle hésita, troublée, ne sachant que choisir : rester dans cette clairière, sadosser au vieux chêne, sendormir avec lui ? Ou pénétrer plus avant dans la forêt primaire, semée dembûches entre mythes et réalité ?
Pour se retrouver, rejoindre la silhouette dont elle nétait que lombre projetée sur le sol, il ny avait quune solution. Elle eut un demi-sourire pour le chêne endormi et gagna les sous-bois sans émoi ni regrets. Les lianes sélançaient de branche en branche, les buissons buissonnaient dépines et de mousse. A lépoque romaine, cette forêt sappelait Solitudo ; cest du moins ce que prétendaient les anciens. Lombre redressa la tête, la solitude serait sans doute passagère. Du moins, elle lespérait.
Elle marcha longtemps, les sens en éveil. Où se terrait la silhouette dont elle était le double ? Cet oiseau perdu, écorché par les mots et le regard dautrui. Il lui faudrait réapprendre à saimer, laisser une fleur despoir éclore en sa mémoire, valser et senivrer dindépendance, reprendre goût à la vie. Lombre saurait lui parler et lui permettre de rejoindre le monde. Dialogue de lâme avec elle-même, de lombre avec son Moi. La forêt Solitudo nétait pas une fin en soi, mais un lieu de ressourcement, avant de franchir la lisière du bois et de renaître.
Insensiblement la peine-ombre se mua en arc-en-ciel.
Ann Rocard
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... Et poème (écriture automatique) qui accompagne également le triptyque SOLITUDE :
Solitude est son nom
(écriture automatique)
A laube du printemps,
une fleur sest ouverte.
Des pétales dor pur où la pensée ségare,
des feuilles endeuillées car lhiver fut tardif...
Une fleur à lorée dun espace oublié.
Elle ignore son nom,
cest loiseau du matin
qui le siffle en un trille, répété à lenvi :
Solitude choisie quelques années peut-être...
Solitude est son nom, quand la chaîne se brise.
Se laissant emporter en un long tourbillon,
dialogue avec soi-même pour mieux se décentrer.
Lété est déjà là.
Les abeilles sétonnent :
Quelle est donc cette fleur qui se métamorphose ?
Et quand revient lautomne, une fleur apaisée
retrouve enfin les mots aux confins du langage.
Tant de mots pour le dire, tant de mots pour le rire,
déchanges en spirales, de souffles inconnus.
Solitude est son nom.
Solitude et partage.
Ann Rocard
Pour essayer de rendre un peu mieux les volumes, voici trois photos prises sous un angle différent...
ÉCLOSION (Solitude I) - Ann Rocard - 2014
23 x 23 cadre compris.
FOISONNEMENT (Solitude II) - Ann Rocard - 2014
23 x 23 cadre compris.
APAISEMENT (Solitude III) - Ann Rocard - 2014
23 x 23 cadre compris.
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